Marché mondial de la viande bovine : Etat des lieux des forces en présence

2012 aura été une année de reprise pour la production mondiale de viande bovine. Et les échanges mondiaux reprennent depuis 3 ans, sous l´impulsion de nouveaux acteurs (Inde) et par une demande croissante des pays asiatiques. Telles sont les conclusions des travaux du département économie de l´Institut de l´Elevage (GEB) dont voici les principaux enseignements.

UE : une consommation en berne mais des prix en progression Le cheptel européen est encore en repli en 2012, à 86.2 millions de têtes de bovins (-1.4% par rapport à 2011). Si la baisse du nombre de vaches laitières s´est poursuivie à un rythme modéré, le nombre de vaches allaitantes a fortement chuté dans bon nombre de pays (Espagne, France, Allemagne et Royaume Uni). Et la baisse du nombre de génisses de 2 ans ne laisse pas augurer d´une possible recapitalisation à court terme. Les importations européennes de viande bovine sont aussi en baisse. La viande brésilienne fait un modeste retour, grâce à la dévaluation du réal et une légère baisse des prix à la production. Le Brésil assure ainsi 43% des approvisionnements de viande en Europe. En y rajoutant la part importée depuis l´Argentine et l´Uruguay, on totalise 80% de la viande arrivant en Europe. A noter que la viande en provenance d´Australie, malgré un modeste 7% du total, est en très forte progression par rapport à 2011. Les exportations suivent la même tendance baissière : que ce soit en carcasse ou en vif. Pour cette deuxième catégorie, les chutes d´exportations concernent surtout les veaux et les broutards, tandis que les jeunes bovins finis progressent, notamment pour l´origine française vers la Turquie et l´origine espagnole vers le Liban et la Lybie. La production affiche un net recul, pour s´établir à 7.8 millions de téc (tonnes équivalent carcasse), sous l´effet de la baisse du cheptel et des hausses des exportations des mâles finis. L´embellie dans ce tableau morose provient de la pénurie d´offre sur le marché européen qui a conduit à une hausse conséquente des prix à la production, qui fait suite à une hausse déjà marquée en 2011. Le prix des JB, qui est descendu autour de 3.7 EUR (JB classe R) depuis quelques mois, devrait augmenter dans les mois à venir. Le prix des vaches (classe R) dépasse les 4,5 EUR. Graphique 1 : Les prix des vaches sont en forte hausse (Voir di-dessus) Turquie : un marché chaotique La Turquie aura permis à la France d´écouler environ 75 000 têtes de bovins finis (contre 47 000 en 2011 - concentrés sur 4 mois) soit une progression de 57%. Mais ce bilan annuel flatteur cache des évolutions en dent de scie, au rythme des fermetures et des réouvertures de marché qui se sont succédées en 2012, notamment pour les JB français. En effet, les différends diplomatiques au sujet d´une éventuelle loi sur le génocide arménien et le passage du virus Schmallenberg ont interrompu les envois de bovins en début d´année. En outre, l´ensemble des achats de vifs finis et de viande ont été stoppés pendant le mois d´octobre afin de soulager les engraisseurs turcs en proie à des difficultés économiques à la veille de l´Aïd, pic traditionnel de consommation. Le marché turc s´avère d´un abord chaotique pour les exportateurs, mais pourtant stratégique : un accord de partenariat commercial approfondi entre UE et Turquie permettrait de stabiliser le marché de part et d´autre du Bosphore. Mais il s´agit là d´un enjeu éminemment politique puisque la Turquie est le plus ancien candidat à l´Union Européenne. Dossier classé pour l´instant sans suite... L´Inde : un acteur désormais incontournable Ce pays possède le premier cheptel mondial : 324 millions de têtes de bovins (2/3 de zébus et 1/3 de buffles) à orientation laitière. La consommation de boeuf en Inde est des plus marginales (1.5 kg/habitant/an contre 15.5kg en Europe, 40kg aux Etats Unis ou 60kg en Argentine). Cela est la conséquence d´interdits religieux (le zébu est un animal sacré qui ne peut être consommé) et d´une population largement végétarienne. Le potentiel de production est immense mais encore largement sous exploité : par le fait, l´Inde est loin derrière les principaux pays producteurs de viande bovine (Brésil, Etats Unis, Europe). Mais l´organisation d´une véritable filière d´export entre 2007 et 2012 a permis à l´Inde de se positionner sur de nombreux marchés extérieurs. Son principal atout : un prix imbattable. Son principal défaut : aucune traçabilité et une maîtrise sanitaire encore insuffisante. On va essentiellement retrouver la viande indienne sur les marchés asiatiques et du Moyen-Orient. Les marchés les plus rémunérateurs (en particulier le marché européen) lui sont par contre formellement interdits. Graphique 2 : Les exportations indiennes augmentent (fichier joint)