Vendée - Lou Mordelle-Juge, nouvel agent de remplacement à Grosbreuil

Portrait de ce jeune homme de 18 ans qui est aussi le Youtubeur 'Le Fermier vendéen'.

Lou Mordelle-Juge a 18 ans. Alors on se dit que ce rendez-vous pourrait être assez court : un parcours forcément succinct, des expériences encore un peu fragiles et une motivation qui pourrait sans doute se résumer à la « passion de l’agriculture ». Les préjugés sont décidément trop simples. Le rendez-vous durera une bonne heure... Lou a plusieurs univers à ouvrir aux autres et ses mots racontent un peu plus que l’évidence de
devenir un jour agriculteur. Lou est agent du Service de remplacement depuis août 2020 dans la zone rétro-littoral (il vit à Grosbreuil). « Oui je sais... à 18 ans on ne connaît pas tout... Je demande sans doute un peu plus d’explications, concède le junior du SR avant d’ajouter, pour contre balancer que « la diversité de mes expériences ne m’a jamais enfermé dans un système ». Sans enracinement familial agricole, l’attraction de Lou vers la terre et les animaux a toujours étonné son entourage. « C’est viscéral, glisse sa maman, ses premiers mots à 18 mois c’étaient “tracteurs”, “vaches”... ». Plutôt doué à l’école, Lou n’y a pas trouvé son compte de verdure. Il étouffe quand la nature n’est pas sous ses pieds. Il a vécu une partie de son enfance dans la ferme de son beau-père dans l’Aude. Tracteurs, bovins, chevaux de trait, vignes... construisent concrètement son rêve de vivre d’agriculture. « J’aime particulièrement les vaches. En fait, j’ai appris à les aimer alors que j’en avais un peur bleue, avoue-t-il en trouvant aujourd’hui une flopée de qualité à ces ruminants (« leur tête, leur rumination, leur corpulence, leur façon de bouger tranquillement »).
Bovins, équins, maraîchage...
C’est en Vendée, où vit sa famille maternelle, et où les productions agricoles siéent mieux à ses aspirations que celles du Sud, qu’il a passé, en juin dernier, son bac CGEA (conduite et gestion de l’entreprise agricole) à la MFR de Venansault. L’alternance lui donne l’occasion de s’immerger plus longuement dans deux exploitations en vaches allaitantes à Grosbreuil. « L’un de mes maîtres de stage est devenu un ami, c’est lui qui m’a conseillé de postuler au SR. Après mon bac, j’avais besoin d’une année de recul, et je n’arrivais pas à me projeter tout de suite en BTS », explique Lou.
Pour sa première mission de remplaçant, il travaille un mois dans une exploitation maraîchère à Saint-Hilaire-La-Forêt. « C’était très physique mais sympathique », conclut le jeune homme qui prend chaque expérience comme un bonus. Il enchaînera avec des interventions en volailles, porcs, lapins... « Toutes les productions ne correspondent pas à ce que j’aime de l’élevage mais j’y trouve toujours un intérêt », glisse le jeune agent. Durant l’automne, l’activité plus ralentie du SR lui permettra de « redescendre dans l’Aude pour faire des semis ». « J’ai ensuite travaillé tout le mois de janvier au centre équestre de Sainte-Foy pour assurer l’alimentation et le nettoyage. J’y ai fait aussi pas mal de réparations mécaniques. Je m’y connais plutôt bien à force de gérer les pannes de ma moto ! Et puis dans la ferme de mon beau-père, j’ai pris l’habitude de me débrouiller avec du vieux matériel ».
Formule 1
La semaine dernière, Lou assurait une mission dans une exploitation de La Jonchère où un administrateur du SR est venu le former à la traite. Au fil des semaines, il solidifie et diversifie encore ses compétences. L’installation reste dans son viseur. « Ne pas être issu d’une famille d’agriculteurs complique mon projet mais, comme pour tout le monde, le nerf de la guerre reste le financement. Ne pas arriver en terrain conquis, ça me donne une chance, celle de choisir mon installation. Des fermes à reprendre il n’en manque pas », relativise Lou armé de confiance.
Si le jeune SR devait dessiner sa future exploitation, il crayonnerait des vaches (« plutôt des charolaises pour leur simplicité l’élevage »), des volailles (« pour la complémentarité et l’efficacité »). Le décor pourrait être normand (« pour la race et les belles prairies »), aveyronnais (« pour les paysages »), mais de plus en plus, finalement, il est vendéen (« pour le cadre de vie auprès des amis »). Lou est d’ailleurs devenu « le fermier vendéen » sur Youtube.
Depuis quatre ans, il y publie ses vidéos de travaux des champs (lire ci-contre). Dans son jardin, plus discrètement, il expérimente quelques plantations et semis. « Sous les recommandations d’un ami exploitant, cette année j’ai testé la résistance au gel du lupin de printemps en le comparant à celui d’hiver ». Orge, féverole, maïs, font partie du panel aussi. Une partie servira à l’alimentation et au paillage de ses deux « poupoules » gris cendré qui divaguent sur la pelouse. Il les aime bien ses poules, qui le font autant rager que rire....
« Je suis aussi fan de formule 1 », lâche sans transition le jeune homme, alors que l’on pensait l’entretien se clôturant sur une note « nature ». «V8, V6, ailettes en carbone, Lewis Hamilton, réforme de l’aérodynamisme en 2022 qui promet plus de spectacle ».... Le décor a changé ! Lou rêve donc aussi de monoplace... Allez savoir si cela aura un lien avec sa ferme de demain...
Catherine Baty