Viande bovine - Rester mobilisé malgré la conjoncture

Tour d’horizon sur l’actualité locale et internationale de la filière viande bovine avec Cédric Mandin, responsable de la section viande bovine à la FDSEA de Vendée.

Commençons par l’échelle locale. Quelle est la situation des éleveurs vendéens ?

Cédric Mandin : Sur le terrain le constat est unanime, l’élevage bovin viande vendéen est en pleine crise et la situation tarde à s’améliorer. Malgré les baisses d’abattages en gros bovins et femelles les cours ne remontent pas et les arrêts d’activité se multiplient. Il n’y a pas une production où les prix couvrent les coûts de production. Malgré les décrets de la loi EGAlim sur le relèvement du seuil de revente à perte, l’encadrement des promotions et la prise en compte des coûts de production, la situation des éleveurs reste critique. Nous continuons de nous mobiliser quotidiennement sur des dossiers comme l’abattage d’urgence, le transport des animaux accidentés ou encore les fraudes à l’étiquetage et aux pesées. Nous poursuivons également les actions de communication pour défendre nos pratiques et compétences lors d’évènements comme Tech’Elevage et Made in Viande. Mais sans une juste rémunération, cœur de notre action, c’est l’avenir de l’élevage vendéen qui est mis en péril.

Changeons d’échelle pour l’Europe cette fois. Quelle est votre réaction quant aux steaks hachés venus de Pologne ?

C.M.: Ce qui m’interroge dans ce dossier, c’est la position de notre administration. Comment FranceAgriMer a-t-elle pu valider l’importation de 780 t de viande pour un montant de 5,5 M€, avec un coût du haché à 3,46€ dans un appel d’offres, alors que c’est par FranceAgriMer que les cotations de vaches passent, aux alentours de 3€/kg de carcasse ? Si on ajoute à ce prix de cotation le coût du transport et celui de la transformation, il est étonnant que le tarif de ces steaks polonais n’ait pas mis la puce à l’oreille de notre administration. Et puis, il s’agit de la seconde affaire polonaise en peu de temps… Et pendant que l’on distribue de la pseudo-viande à des personnes à faibles revenus, on continue de nous demander à nous éleveurs de monter en gamme. Et c’est ce que nous faisons. Il faut que l’État français agisse pour pousser nos productions dans la restauration hors domicile et en finir avec le prix comme premier critère des appels d’offres.

Une partie de la production de viande bovine française est destinée à l’export. Le fait que le Brésil ait été amené à stopper sa commercialisation vers la Chine peut-il redonner un élan pour la filière française ?

C.M.: Pour cela, c’est à nos entreprises de réagir et de réagir vite, comme nous le préconisions la semaine dernière à la FNB. Nous savons que depuis la levée de l’embargo, Elivia exporte en Chine. Mais trop timidement : seulement deux containers de viande ont été envoyés par bateau. Et il semblerait que ce soient principalement des questions administratives qui freinent le marché. Il faut cependant profiter de l’opportunité qui s’offre à nous pour montrer la qualité de la viande bovine française aux chinois et prendre des parts de marchés. Si nos exportateurs se montrent suffisamment réactifs, cela pourrait faire remonter les cours et donner un peu de souffle aux producteurs de la filière. Nous avons pu constater les effets du marché chinois sur la filière porcine. Il faut que cette situation se propage à la viande bovine.

Enfin, il semblerait que l’on se rapproche de l’accord entre l’Union européenne et les pays du Mercosur. Une mauvaise nouvelle, cette fois pour la filière ?

C.M. : D’un côté notre ministre de l’Agriculture affirme que la France n’importera pas de produits qui ne correspondent pas aux critères de production franco-français, comme le stipule l’article 34 de la loi des Etats généraux de l’alimentation, et de l’autre, on constate que la signature entre l’UE et le Mercosur tend à se finaliser. Si cela se concrétise, la France devra se plier aux accords européens. À cela s’ajoute la validation prochaine par nos parlements français des accords du Ceta, prévue au mois de juillet, dont les conséquences sur notre marché seront à déplorées. Nous devons alerter les consommateurs sur ce qu’ils achètent et consomment dans la restauration hors domicile. La France est en période de tests sur l’étiquetage des produits importés et transformés. Il faut qu’une loi en découle pour permettre la mise en place rapide d’un système d’étiquetage précis et explicite, pour que les consommateurs puissent choisir en toute connaissance de cause.
Dans ce contexte, nous continuerons à défendre notre modèle de production et la qualité de nos animaux et de nos produits. La consommation française  en viande bovine a augmenté de 1,8% cette année et le hamburger est devenu le premier sandwich consommé par le français ! Tous les signaux sont au vert. Nous devons rester mobiliser et saisir les opportunités qui s’offrent à nous, tant au niveau de l’étiquetage que de la segmentation positive ou de la restauration hors domicile… La filière viande bovine française a encore de nombreuses cartes à jouer.